Quelqu’un vous doit de l’argent? Vous vous demandez quels sont vos recours? Pour commencer, vous pourriez faire parvenir une mise en demeure à votre débiteur. Celle-ci pourrait vous faire sauver temps et argent.

QU’EST-CE QU’UNE MISE EN DEMEURE?

Une mise en demeure se présente sous forme écrite1, généralement sur support papier. Elle a pour but d’aviser formellement une personne d’exécuter son obligation dans un délai imparti, à défaut de quoi elle sera exposée à des procédures judiciaires sans autre avis ou délai additionnel. Celle-ci peut être rédigée par quiconque, bien qu’il puisse être avantageux de la faire rédiger par un avocat.

En matière de perception de comptes, cette lettre formelle met simplement en demeure votre débiteur de rembourser, dans un délai raisonnable2, la dette qu’il a contractée auprès de vous. Ainsi, la lettre précisera entre autres la somme réclamée, la source de la réclamation, le nombre de jours accordé au débiteur pour remédier à son défaut en payant la somme due et l’intention d’entreprendre des procédures judiciaires à défaut d’obtempérer à la mise en demeure dans le délai imparti.

QUELS SONT LES AVANTAGES D’UNE MISE EN DEMEURE?

La mise en demeure est envoyée dans le but de tenter de recouvrer sa créance sans devoir assumer de frais additionnels, par exemple ceux découlant de l’introduction d’un recours judiciaire.

À défaut d’une entente contractuelle entre les parties sur l’application d’intérêts en cas de défaut de paiement, la mise en demeure permet aussi de faire courir les intérêts sur la somme due au taux légal (actuellement de 5 %) à compter de la date de la mise en demeure3. Le tribunal peut aussi octroyer une indemnité additionnelle (actuellement de 2 %) depuis la mise en demeure4.

Enfin, la mise en demeure permet parfois d’ouvrir des négociations, de démontrer votre sérieux dans vos démarches et de régler le litige plus rapidement, surtout si celle-ci a été rédigée avec soin par un avocat.

COMMENT ENVOYER UNE MISE EN DEMEURE?

En matière de perception de comptes, la mise en demeure peut, en principe, être envoyée par tout moyen : huissier de justice, courrier recommandé, courriel, en mains propres, etc. La seule exigence est qu’elle soit faite par écrit5. Toutefois, il faut s’assurer que le moyen choisi permet de se constituer une preuve de la réception de la mise en demeure. Le choix du moyen va varier selon les objectifs du créancier.

La notification par huissier de justice permet de constituer une preuve des plus solides de la réception du document, puisque l’huissier atteste la signification du document sous son serment professionnel. Contrairement à l’envoi par courrier recommandé, la partie adverse ne pourra pas éviter la réception en ne passant pas chercher la lettre au bureau de poste. De plus, l’impact psychologique de la visite d’un huissier chez soi peut montrer le sérieux de la démarche et favoriser le paiement de la créance. Toutefois, il faut savoir que cette option demeure la plus dispendieuse.

L’envoi d’une lettre recommandée peut souvent s’avérer une option intermédiaire de choix. Le courrier recommandé permet d’obtenir un numéro de repérage pour suivre la livraison de la lettre. Ensuite, il est normalement demandé au destinataire de signer un accusé de réception. De plus, si ce moyen occasionne quelques frais, ceux-ci sont bien moindres que la première option. Pour ces motifs, la lettre recommandée est souvent le moyen retenu en matière de perception de comptes.

Le courriel confère certains avantages, comme la rapidité de la réception après l’envoi et l’absence de frais de transmission. Aussi, si l’adresse postale du débiteur est inconnue, par exemple à la suite d’un déménagement, le courriel peut s’avérer une solution pratique pertinente. Toutefois, il est moins aisé de prouver que le courriel a bel et bien été reçu par son destinataire et ce mode de transmission a généralement un impact psychologique plus faible sur le débiteur.

La remise en mains propres de la mise en demeure est possible, mais peut parfois mener à des situations délicates, par exemple si le débiteur a un tempérament particulier ou difficile. Puisque la remise est faite en personne par le créancier, l’effet psychologique peut aussi parfois être amoindri. Celui-ci pourrait, en effet, profiter de la présence du créancier pour fournir diverses excuses et énièmes promesses de paiement non sérieuses, puis pourrait ne pas se sentir obligé de tenir compte de la lettre reçue. Enfin, s’il est hautement recommandé de faire signer un accusé de réception par le débiteur lors de la remise en mains propres, le débiteur pourrait très bien refuser, ce qui entraînerait une difficulté pour faire la preuve de la réception si la partie adverse ne l’admet pas ultérieurement.

LA MISE EN DEMEURE EST-ELLE OBLIGATOIRE?

De façon générale et sauf exception, la mise en demeure n’est pas obligatoire en matière de perception de comptes6. Toutefois, il faut savoir que si votre débiteur est poursuivi sans avoir été préalablement mis en demeure et qu’il s’exécute dans un délai raisonnable de l’introduction de l’action, alors vous ne pourrez pas réclamer vos frais de justice (lien vers prochain Saviez-vous que) et vous devrez, en principe, rembourser les siens.

LA MISE EN DEMEURE DOIT-ELLE ÊTRE RÉDIGÉE PAR UN AVOCAT?

La mise en demeure peut être rédigée soit par le créancier, soit par un avocat mandaté par le créancier. Toutefois, l’idée est que la lettre soit efficace et qu’elle soit prise au sérieux par le débiteur. La préparation d’une mise en demeure par un avocat va ainsi augmenter la crédibilité de la démarche, puisque celui-ci va s’assurer que la lettre est bien rédigée et que vous êtes dans vos droits. La signature d’un avocat sur la lettre va aussi informer d’emblée le débiteur qu’un professionnel a déjà été mandaté, ce qui lui montre le sérieux du créancier dans son intention indiquée dans la mise en demeure d’entreprendre immédiatement des procédures judiciaires à défaut par le débiteur de s’exécuter dans le délai imparti. Ainsi, la mise en demeure signée par un avocat peut contribuer à convaincre le destinataire de s’exécuter rapidement.

En somme, si vous avez un compte à percevoir, nous vous recommandons généralement de commencer par une mise en demeure envoyée à votre débiteur, vu les nombreux bénéfices que cette lettre formelle peut conférer. Puis, dans le cas où la mise en demeure ne porte pas ses fruits, vous pourrez intenter un recours judiciaire pour obtenir une condamnation pour la somme due en déposant une demande introductive d’instance.

1 Code civil du Québec, RLRQ, c. C-1991, art.1595 al.1 (ci-après : « C.c.Q. »).
2 Art.1595 al.2 C.c.Q. : le délai d’exécution doit être suffisant, eu égard à la nature de l’obligation et aux circonstances; autrement, le débiteur peut toujours l’exécuter dans un délai raisonnable.
3 Art.1617 C.c.Q.
4 Art.1619 C.c.Q.
5 Art. 1595 al. 1 C.c.Q.
6 Art.1594 C.c.Q.