En matière d’exécution de jugement, la saisie du salaire d’un débiteur peut s’avérer être une option avantageuse pour un créancier. En effet, contrairement à la saisie de biens meubles ou immeubles, la saisie du salaire n’implique pas de processus de vente des biens saisis.

L’employeur doit-il collaborer ?

La saisie du salaire est une forme de saisie en main tierce, puisqu’elle s’exécute directement contre l’employeur qui est tenu par la loi de retenir à chaque paie la partie saisissable du salaire au profit du créancier saisissant¹.

L’employeur doit donc non seulement collaborer, mais à défaut par celui-ci de déclarer, de retenir ou de déposer les sommes d’argent, ou si sa déclaration s’avère fausse, il peut être condamné à payer la somme due au créancier saisissant comme s’il était lui-même débiteur²! Il aura donc tout intérêt à ne pas prendre la notification d’un avis d’exécution à la légère.

Peut-on saisir l’ensemble du salaire ?

Le créancier saisissant ne peut saisir l’ensemble du salaire de son débiteur. La loi accorde en effet une protection pour une partie des revenus. Il faut donc recourir à la formule prévue par la loi afin de déterminer la portion saisissable³.

Le calcul de la partie saisissable du salaire

De manière générale, le calcul de la portion saisissable du débiteur se fait avec la formule (A – B) x C, où A correspond aux revenus du débiteur, B correspond à certaines exemptions auxquelles le débiteur pourrait avoir droit et C correspond à un pourcentage prévu par la loi.

Les revenus du débiteur

Sauf exception, il faut tenir compte de l’ensemble des revenus que tire le débiteur en contrepartie de son travail, incluant notamment les prestations de retraite, les rentes, les indemnités de remplacement de revenu et les aliments accordés en justice. Toutefois, sont notamment exclus les aliments destinés aux besoins d’un enfant mineur et les contributions de l’employeur à une caisse de retraite ou d’assurance.

Les exemptions

Ensuite, il faut déduire du total des revenus le total des exemptions auxquelles le débiteur a droit pour sa subsistance et celles des personnes à sa charge. Ces exemptions sont établies sur la base du montant octroyé mensuellement à titre d’allocation de solidarité sociale pour une personne seule en vertu de la Loi sur l’aide aux personnes et aux familles. Les montants varient annuellement et selon le nombre de personnes à charge.

À titre d’exemple, le montant d’exemption pour une personne rémunérée aux deux (2) semaines, qui n’a pas de personne à charge, pour la période allant du 1er avril 2016 au 31 mars 2017, correspond à 546,35 $.

Le pourcentage prévu par la loi

Finalement, on multiplie la somme obtenue par le taux de saisie, qui équivaut à généralement à 30 %. Toutefois, lorsque la dette résulte du partage du patrimoine familial, du paiement d’une dette alimentaire ou d’une prestation compensatoire, le taux de saisie est alors de 50 %.

Le résultat obtenu correspond à la portion saisissable des revenus.

Exemple concret du calcul de la portion saisissable des revenus

Voici un exemple concret qui détermine la partie saisissable des revenus d’un débiteur :

Georges a obtenu un jugement contre Bertrand parce que ce dernier ne lui a pas remboursé un prêt d’argent. Malgré le jugement, Bertrand néglige de le payer. Georges a appris que Bertrand travaillait dans une usine et qu’il gagnait un salaire intéressant. Il veut savoir s’il peut saisir son salaire et si oui, quelle partie ?

Bertrand travaille dans une usine et obtient un salaire brut de 1 500,00 $ à chaque deux (2) semaines. Il obtient également, à chaque deux (2) semaines, une rente de 500,00 $. Il n’a pas de personne à charge et vit seul.

Ses revenus, aux fins du calcul, sont donc de 2 000,00 $. Il a de plus droit à une exemption de 546,35 $. Le taux de saisie applicable à lui est de 30 %.

Le calcul se détail ainsi :

(1 500,00 $ + 500,00 $ – 546,35 $) X 30 % = 436,10 $

Georges pourrait donc saisir 436,10 $ sur chaque paie que Bertrand va recevoir, et ce, tant que la dette ne sera pas éteinte en capital, intérêts et frais.

La saisie du salaire peut donc être une option intéressante lorsqu’un débiteur néglige d’acquitter une dette résultant d’un jugement. Il ne faut pas oublier qu’un créancier peut également saisir les biens meubles, les biens immeubles ou encore le compte de banque de son débiteur afin de couvrir l’ensemble de sa créance.

Rédigé avec la précieuse collaboration de Marc-Antoine Pitre, stagiaire en droit.

 

¹Article 713 du Code de procédure civile (ci-après : « C.p.c. »)
²Article 717 C.p.c. À noter que l’employeur peut néanmoins en tout temps obtenir l’autorisation de déclarer ou de déposer en payant les sommes qu’il aurait dû retenir et déposer depuis la notification de l’avis d’exécution. Celui-ci sera toutefois alors tenu des frais occasionnés par son défaut.
³Article 698 C.p.c.